La pandémie de COVID-19 et ses impacts persistants restent le contexte clé du Forum politique de haut niveau (FPHN) des Nations Unies de 2021. Alors que les organisations de la société civile (OSC) sont souvent en première ligne de la réponse à la pandémie et malgré les défis auxquelles elles font face, le POED et ses membres restent fermes dans leurs efforts pour contribuer à l’avancement des objectifs de développement durable (ODD) tels qu’inscrits dans l’Agenda 2030.
La déclaration ministérielle brosse un tableau inquiétant, et souligne l’urgence du défi qui nous attend. Cependant, nous constatons un écart entre les preuves présentées au FPHN, en particulier les examens nationaux volontaires (ENV), et la réalité sur le terrain basée sur les preuves recueillies par nos membres. Nos résultats montrent que sur les 45 pays couverts par l’étude du POED, seuls 46,7 % ont estimé que les allocations budgétaires étaient alignées sur les ODD ; seuls 60,0 % ont témoigné d’informations accessibles au public sur la mise en œuvre des ODD ; et seuls 6,7 % ont eu accès à des financements pour un engagement accru des parties prenantes. Ces chiffres diffèrent grandement des tableaux idylliques que les gouvernements décrivent souvent lors des présentations de leur ENV au FPHN.
Pour l’efficacité de la réponse à la COVID-19
Bien que la déclaration ministérielle reconnaisse l’importance de s’attaquer à la pandémie et aux défis qui y sont associés, le POED s’inquiète du fait que cette reconnaissance ne se traduise pas par des engagements adéquats pour répondre au besoin urgent d’un accès libre et équitable aux technologies et aux services de soins de santé liés à la COVID-19. Notre plateforme rappelle que la persistance de la COVID-19, les réponses insuffisantes à travers les pays, et le manque d’une véritable collaboration multi-acteurs, risquent de faire régresser les progrès antérieurs des ODD.
Nous demandons aux gouvernements de mettre en œuvre une réponse à la COVID-19 basée sur la solidarité mondiale et de veiller à ce que les vaccins et les produits médicaux de la COVID-19 soient disponibles pour tous dans le monde entier. Les droits de propriété intellectuelle devraient être suspendus temporairement à cette fin, afin que la technologie de production et le savoir-faire puissent être largement partagés. Le POED souligne que, pour être efficaces, les efforts de redressement social et économique doivent tenir compte de l’impact très inégal de la pandémie sur les différents secteurs et acteurs de l’économie. Ces efforts doivent donner la priorité aux femmes et à tous les secteurs qui ne bénéficient pas de protection sociale. Les mesures de relance économique doivent privilégier les micro, petites et moyennes entreprises plutôt que les grandes.
La transparence et la responsabilité dans les actions des gouvernements et des donateurs liées à la Covid-19 sont nécessaires pour assurer une réponse inclusive. Il est également important de veiller à ce que les connaissances, l’expertise et les initiatives de la société civile soient mises à profit pour lutter contre la pandémie. Il est donc essentiel que les gouvernements cessent d’utiliser l’endiguement de la pandémie comme prétexte pour surveiller et supprimer la dissidence politique.
Téléchargez notre étude sur les ENV 2021 ici.
Les ODD ne sont pas sur la bonne voie et même menacés
Nous témoignons que les taux de pauvreté ont augmenté, inversant la tendance à la réduction de la pauvreté pour la première fois depuis des décennies. Nous partageons l’inquiétude que l’objectif d’éradication de la pauvreté d’ici 2030 nous échappe, ainsi que le principe de ne laisser personne de côté dans nos efforts pour réaliser un développement inclusif et durable pour tous.
La reconnaissance du fait que « le monde est loin d’atteindre l’objectif de sociétés pacifiques, justes et inclusives et d’institutions efficaces, responsables et inclusives, ainsi que de parvenir à un processus décisionnel réactif, inclusif, participatif et représentatif à tous les niveaux » doit être soutenue par une action à tous les niveaux pour inverser la tendance au rétrécissement et à la fermeture de l’espace civique dans le monde entier. Si nous soutenons l’accent mis sur le développement inclusif fondé sur la réalisation des droits humains pour tous, ce sentiment doit aller au-delà des déclarations internationales et être soutenu aux niveaux national et local.
Nous nous félicitons de la déclaration réaffirmant l’engagement envers la coopération internationale, le multilatéralisme et la solidarité, en particulier dans le cadre de l’accélération des partenariats multipartites qui sont fondés sur la Déclaration universelle des droits de l’homme et les principes d’une coopération efficace pour le développement. Nous saluons et soulignons la réaffirmation d’un « engagement politique fort pour créer un environnement favorable à tous les niveaux », mentionné en particulier en relation avec l’objectif 9 pour faciliter le développement d’infrastructures durables et résilientes dans les pays en développement. Toutefois, cet engagement ne devrait pas se limiter à l’objectif 9, mais s’appliquer à tous les objectifs. Dans cette optique, nous réaffirmons qu’il n’y a pas d’environnement favorable sans un engagement structuré, transparent et responsable de la société civile, en particulier des communautés marginalisées, des personnes et des cultures touchées par ces efforts de développement.
Les approches habituelles étaient insuffisantes avant la pandémie, et le sont d’autant plus que le monde lutte contre de multiples crises tout en essayant de poursuivre la réalisation des ODD. Nous devons souligner l’importance de l’engagement de la société civile dans la mise en œuvre de l’Agenda 2030 en formalisant et en institutionnalisant la participation des OSC aux structures de gouvernance. Pour ce faire, il faut soutenir et renforcer la participation de la société civile par le biais de lois, de mécanismes, de ressources et d’un développement des capacités de la société civile, en particulier celle des groupes marginalisés, les travailleurs et travailleuses, y compris celles et ceux du secteur informel, ainsi que les communautés rurales et les populations autochtones.
Un financement du développement qui répond aux besoins des pays
Nous soulignons l’appel lancé par la déclaration ministérielle pour inciter les pays développés à respecter leurs engagements en matière d’APD envers les pays en développement et à intensifier ces efforts afin de jouer un rôle significatif dans l’éradication de la pauvreté et des inégalités. Nous soutenons l’urgence d’accroître les moyens de mise en œuvre pour les pays en développement en mobilisant des ressources pour faire face à l’atténuation et à l’adaptation au changement climatique, ainsi qu’au processus de redressement post-COVID-19 et à la mise en œuvre globale des ODD.
Les cadres nationaux de financement intégrés peuvent servir un objectif précieux tant qu’ils sont considérés à travers les principes d’efficacité, qu’ils les promeuvent et qu’ils les respectent. Nous partageons la préoccupation selon laquelle l’aggravation du fardeau de la dette pourrait paralyser la reprise économique et encourageons donc les initiatives visant à réduire ou à supprimer complètement le fardeau de la dette dans les pays qui en ont le plus besoin. Nous nous félicitons de la reconnaissance du fait que la coopération Sud-Sud et triangulaire peut et doit apporter des contributions importantes à la mise en œuvre de l’Agenda 2030, mais aussi qu’il est nécessaire d’améliorer l’efficacité de ces modalités de coopération. Nous notons également la référence aux processus en cours pour moderniser l’APD et en particulier la proposition d’une nouvelle mesure sur le soutien officiel total au développement durable. Dans cette optique, nous souhaitons mettre l’accent sur l’affirmation » qu’une telle mesure ne diluera pas les engagements déjà pris « .
Avec ces références dans la Déclaration ministérielle, la POED souligne l’appropriation démocratique de l’Agenda 2030 et la nécessité de le traduire en plans, programmes et efforts de suivi locaux avec la société civile, et de s’assurer que les priorités locales informent les plans nationaux et le processus des ENV. Les gouvernements doivent examiner et aligner les budgets nationaux et locaux en fonction de la stratégie et des priorités du pays en matière d’ODD, en mettant en œuvre des processus budgétaires participatifs qui garantiront que les besoins des communautés locales sont entendus. Dans les rapports sur les progrès réalisés dans la mise en œuvre de l’Agenda 2030, les liens entre les politiques et programmes spécifiques, les allocations budgétaires et les résultats doivent être explicitement et clairement tracés. Les obstacles systémiques aux ODD au niveau international, tels que les traités injustes en matière de commerce et d’investissement, la concurrence fiscale et la déréglementation financière, doivent être pleinement compris et traités. Enfin, nous réaffirmons avec force la nécessité de renforcer la solidarité et nous exhortons les États à traduire le contenu de la déclaration ministérielle en une mise en œuvre concrète au niveau national.